Un pied dans les poubelles l’autre au cimetière.
Pour mettre un peu de gaieté sur ce blog, je vais te raconter mon expérience de croque-mort. Tu doutes ? Tu as raison, je débloque parfois, même souvent, mais là c’est de l’authentique ! J’étais jeune (Il y a un demi-siècle! Y a prescription !) et je remplaçais les employés municipaux pendant les grandes vacances. Je ramassais les poubelles et je faisais les enterrements. Tout çà avec le titulaire. On l’appelait Kiki parce qu’il appelait tout le monde Kiki. Ben oui ! Quand tu travailles dans l’authentique faut pas t’attendre aux trouvailles originales qui caractérisent mon style imaginatif, insolite, drolatique, facétieux, spirituel et néanmoins génial. Bref je ramassais aussi les morts pour les amener dans leur résidence définitive. Un enterrement étant payé comme quatre heures de ramassage d’ordures, j’aurais souhaité un Nagasaki local, histoire de gagner quatre sous, parce que les ordures, bonjour ! C’était le ramassage à l’ancienne, avec les poubelles bien collantes au fond, moulées à la louche, avec les asticots pour la pêche. Tu parles, on passait pas tous les jours et l’été j’te dis pas, le sac poubelle était encore inconnu, surtout dans mon bled.. Le camion, bringuebalant, avait la benne non couverte qui se montait en pompant manuellement pour vider les ordures. C’était d’un pratique ! Tu faisais ça dans le bon air de la décharge. A l’époque on les arrosait pour accélérer la fermentation. La première fois que j’ai vu l’énorme tas d’ordures j’ai cru avoir des troubles de la vision. Non c’était le milliard et demi de mouches qui volant là donnaient cette impression. Welcome in puruland ! (l’authentique n’exclut pas un trait d’humour de temps en temps) .Mais avant d’arriver là, il y avait l’épreuve du parcours avec mézigue accroché derrière le fourgon, comme un Ben Hur moderne, à éviter les papiers gras qui s’envolaient quand le camion prenait de la vitesse. Autant te dire qu’à chaque mort je claquais des mains. Les morts c’est propre, ça pue pas, du moins pas au début, et le cimetière est quand même plus sympa que la décharge et les gens sont calmes. Plus calmes que les petits gitans qui courraient après notre camion quand on arrivait à la décharge. C’était le seul véhicule qui n’était pas équipé de broyeur, autant te dire qu’il y avait de la récup à faire. Parfois aussi il y avait la fanfare des rats qui nous accueillait, non je déconne, ça c’est du Reiser, et c’est pour voir si tu crois tout ce que je te dis. Le premier enterrement est programmé pour demain. Les morts, ça peut attendre ! Bon Toi aussi !