Sans peau, tu peux pas sortir en plein jour. Non pas que tu risques un coup de soleil, maigre avantage, mais tu risques de dessécher rapidement et te retrouver en squelette. Avec le nombre de voleurs de squelettes qui courent les rues, j'avais pas envie de finir suspendu à une potence dans une classe de sciences naturelles en Zone d'Education Prioritaire. Tu te retrouves vite avec une clope entre les dents et un gode entre les fémurs, ou l'inverse d'ailleurs. Tout ça pour faire marrer des bandes d'abrutis boutonneux. Non, tu l'avoueras, je ne méritais pas ça, …quoique. Pour les courses, ce sont mes voisins qui m'approvisionnaient. Un couple de retraités charmants, eux avaient vendu toutes leurs illusions, et avec l'argent ils s'étaient achetés un joli tombeau dans le cimetière marin. Au printemps, ils m'invitaient à aller y faire un pique-nique. Ils avaient fait construire leur tombeau comme une table de randonneur, toute en marbre, ils dépliaient les chaises, forcément pliantes, et saucissonnaient au grand air, avec vue plongeante sur la mer qui dansait le long du golfe clair, tranquille sous un cyprès providentiel.. Comme je craignais le soleil, je rentrais dans le tombeau, dans l'ombre humide de la sérénité. "Qu'est-ce qu'on sera bien ici" disait la dame, "Qu'est-ce qu'on y est déjà bien" surenchérissait son chéri, sous un chérubin. (répète plus vite pour voir!) Et le vin aidant je me tapais des siestes d'enfer paradisiaques. Qu'est-ce qu'on dort bien dans un tombeau, tu m'étonnes qu'il y ai écrit partout "ici repose".. (A suivre à moins que ce soit déjà la fin)