J’ai vu la vierge
L’hiver glacial mordait décembre avec violence. J’avais passé la journée à couper du bois, dans le froid et la sueur. Aussi, je me glissais délicatement dans un bain chaud, seulement éclairé par une bougie odorante, et là j’écoutais le silence. Le silence est la seule musique qui ne supporte pas une fausse note, ni une vraie d’ailleurs. La flamme de la bougie se mit à vaciller. Elle m’est alors apparue tout de blanc et de bleu vêtue, comme une supportrice de l’OM.
-Oh ! Bonne mère ! La femme qui a accouché du Seigneur par son oreille…
-oui, c’est moi !
-vous vous croyez où ? Vous entrez sans frapper ! Dans mon intimité !
-Je ne suis pas un esprit frappeur, je vous apparais simplement pour que vous arrêtiez de blasphémer et que vous croyez en moi.
-Croire en vous simplement parce que je vous vois, c’est ridicule, hier j’ai vu un père Noël dans la rue, ben je ne crois pas en lui, et pourtant il me fait des cadeaux. Prenez Macron, il existe, pourtant pas grand monde croit en lui. Alors allez apparaitre ailleurs, je n’ai pas envie que ma salle de bain soit un lieu de pèlerinage, avec les marchands du temple dans mon jardin, à vendre de l’eau bénite en bidon et des crucifix en plastique made in chine. Si vous voulez qu’on vous croit allez sur internet, tout le monde croit ce qu’ils y voient, mais enlevez votre voile, ils vont vous prendre pour une musulmane.
- Toujours le blasphème !
-Ecoutez Marie, vous n’avez pas l’impression de vous faire manipuler par vos hommes, c’est toujours vous qui vous y collez pour une apparition. Et Joseph, le cocu céleste, qu’est-ce qu’il est devenu ce brave homme ?
Plooot
-Je suis là ! Et Joseph fit aussi son apparition !
-Mais vous n’allez pas me refaire le coup de la crèche ?
Ploot. Ploot. Là c’est le bœuf et l’âne qui se matérialisèrent.
Je ne sais pas qu’elle est la surface de ta salle de bain, mais je dois t’avouer qu’ici on commençait à être à l’étroit et à sentir un peu l’étable. Hors de moi, je me levais du bain, saisis la serviette et commençait à envoyer des coups de torchon, à droite, à gauche, tous disparurent un par un, le bœuf sans doute effrayé par mon attitude lâcha une énorme bouse, qui, elle, ne disparut pas, pire je la sentais prendre ses aises mollement, comme une glace italienne en plein soleil. A ce moment une voix fluette résonna derrière la porte.
- Ne mets pas de l’eau partout en sortant du bain, j’ai fait le ménage à fond ce matin.