Dans le retro. Une vraie aventure du quotidien.
Je quittais ma deuxième résidence secondaire qui est Leroy Merlin où j’étais venu acheter du mortier. Je te rassure ma première résidence secondaire est la déchèterie. Sur la route d’accès à la zone commerciale je suis une voiture qui roule à 15Km/h. Elle se dirige vers l’entrée d’un parking à droite avant de changer d’avis alors que j’allais la doubler. Il y a deux voies étroites et une ligne blanche continue, la voiture refait le coup, semble s’engager puis revient sur sa décision. Je lui fais un appel de phare, j’ai horreur de klaxonner, j’ai d’ailleurs cherché longtemps où il était avant de voir l’incrustation d’un clairon sur le volant. La voiture met son clignotant et se gare contre le trottoir. Je suis obligé de chevaucher la ligne blanche. En doublant, je regarde le conducteur qui parle à son passager, je vois que son cou, un cou de joueur de rugby, première ligne de mêlée, et une coiffure à la kim Jong-un. Le genre à être amoureux d’une batte de baseball. Je dois avouer que ça m’a dissuadé de l’engueuler. Mais au moment où je dépasse, Blong ! Un grand coup dans la portière arrière. Je pense à un coup de pied de King Kong, mais je me demande comment il a fait. Je roule traverse un rondpoint surchargé, continue dans une zone pavillonnaire où je m’arrête pour regarder les dégâts. Et qui se gare après moi ? King Kong ! C’est le passager, un homme d’une cinquantaine d’années, qui sort et me dit que j’ai cassé le retro, très poliment, trop ! Bon on va voir, je m’attendais à le voir pendre, mais pas du tout, il est en place. Je le touche et le miroir tombe.
-c’est rien, il est juste déboité.
-Non, non, il est cassé !
-Mais les deux fils ne sont pas raccordés !
-Vous les avez arrachés.
Je sens un peu la carabistouille et je dis qu’on va faire un constat. J’entre dans ma voiture je cherche dans la boite à gants. Je n’en ai pas ! Il me dit qu’eux non plus n’en ont pas. La porte passager s’ouvre et le gars me demande s’il peut s’assoir.
Une fois assis il me dit que c’est la voiture du patron et que peut-être il va pouvoir prendre ça à son compte et il téléphone. Un coup de fil bizarre, je n’entends pas du tout son correspondant, en tout cas le monologue donne ça :
-J’ai eu un accrochage avec un monsieur sympathique qui a cassé le rétro. On peut le prendre en compte ?
-Ah non ! Mince ! et on n’a pas de constat.
-A l’amiable, oui.
-Combien ça coûte ? Il dit le nom de la marque et a la réponse de suite.
-145€, c’est pas cher, dit-il en me regardant et en jetant un œil à l’arrière de mon Kangoo. Avant de venir je suis passé à la déchet balancer des gravats et des encombrants. Et à mon habitude j’ai gardé des merdes dont je pense avoir un jour l’utilité, mais qui seront du prochain voyage.
-145€, pas cher ? Vous plaisantez, j’ai que 20€. S’il n’y avait pas eu le sumo toujours au volant, j’aurai foutu le mec dehors, mais là, fallait ruser.
-Et d’abord comment j’ai pu vous accrocher, mon rétroviseur n’a rien.
-Il est plus haut !
-Vous étiez garé, si j’ai pas touché avec la porte de devant comment c’est possible.
- vous vous êtes rabattu trop vite. On s’était arrêté pour laisser passer un piéton.
- Non, non, ne me prenez pas pour un imbécile, il n’y avait pas de piéton, vous avez mis le cligno et vous vous êtes serrés du trottoir.
-Il avait mis le cligno ?
-Oui ! et comment je vous ai pas embouti l’aile ?
-bon écoutez, je prends 45€ à ma charge et vous m’en donnez 100 ! Et là je comprends que c’est une vraie arnaque.
-Mais je ne les ai pas. J’en ai que 20.
-On va au distributeur et vous les retirez ! C’est ça avec King kong sur mon épaule ;
-Mais j’ai pas ! et là je me dis qu’il faut que je l’arnaque aussi
-Je touche une retraite de misère, je travaille au black pour finir le mois et vous voulez que je vous file 100€ ?
-50 alors ! Je me dis que je ne suis pas si mauvais comédien, mais il faut en finir.
-Mais enfin regardez dans quoi je roule ! Regardez-moi ! Je suis coiffé comme… comme personne, je ne suis pas coiffé du tout ! Version ébouriffé ! Et là, éclair de génie, je sors mon portable, un truc du néolithique inférieur et je lui dis.
-Si j’avais 50 € vous croyez que j’aurais ça comme téléphone.
Devant cette preuve irréfutable de pauvreté, ce signe extérieur de misère, il jette l’éponge.
-C’est bon, je m’arrangerais.
J’en rajoute un brin en lui serrant la main. Je monte dans la voiture et attend que King Kong fasse demi-tour et retourne dans la jungle urbaine. Puis faut pas que je traine j’ai rendez-vous chez le coiffeur.(Même ça c’est vrai)
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